L'histoire de la musique raï

Messaoud Bellemou Le Raï est un des principaux genre musical d'Algérie, vous pouvez l'entendre quasiment partout. Cette musique est surtout écouté par une bonne partie de la jeunesse oranaise et algérienne. C'est cette musique qui s'est propagé tel un virus dans le monde. Un virus musical bien sûr...

Que signifie le Raï ? Le Raï signifie l'opinion, le destin, l'expérience, la vision des choses. Dès ses débuts les chanteurs de Raï exprimaient leur avis sur les problèmes des Algériens. Dans les années 30 des chanteurs Oranais comme Ben Yamina ou Doubahi utilisent le Raï pour exprimer leurs points de vue sur la politique (contre l'occupation française), mais aussi contre tous les interdits de la société Algérienne (sexe, alcool, ...).

Aujourd'hui on distingue deux types de Raï, le Raï traditionnel des débuts et le Raï moderne "occidentalisé".

Le Raï traditionnel est celui des origines et perdurera jusque dans les années 70, à l'époque on utilise les instruments traditionnels de la musique arabe, ainsi que les percussions traditionnelles comme la darbouka ou le bendir.

La forme du Raï est beaucoup plus libre que celle des musiques classiques alors appréciés par les gens bien pensant, l'utilisation de l'arabe dialectal est aussi une grande nouveauté qui va donner une grande proximité avec le peuple.

Les chanteurs de Raï sont rapidement obligés d'inventer un langage codé leur permettant d'aborder des sujets difficiles, comme la résistance à la présence française en Algérie, mais aussi les plaisirs de la chair.

Les lieux où l'on peut écouter du Raï à cette époque sont souvent des bars, et cela contribue à faire des interprètes de cette musique de véritables paria en dehors de la bonne société. Leur statut est pourtant complexe, on leur attribue le titre de cheikh ou cheikha (maître, maîtresse, au sens de celui qui maîtrise son art), tout en les considérant comme des gens peu fréquentables.

Dans les années 1930, on chante le wahrani, adaptation du melhoun accompagnée à l'oud, à l'accordéon, au banjo ou au piano. Cette musique ce mélange aux autres influences musicales arabes, mais aussi espagnoles, françaises et latino-américaines.

Les années 50 marquent l'arrivée des femmes dans la musique Raï avec en particulier Cheikha Remitti (Charak gataâ), dont le franc-parler irrite plus d'un traditionaliste. La guerre d'indépendance Algérienne marque une période de creux pour l'activité culturelle, certains artistes ayant rejoint le maquis. Cette musique qui, à l’origine, ne rassemble que quelques chanteurs, finit par s’étendre, après l’indépendance, à l’ensemble de l’Algérie.

Les instruments traditionnels du Raï (flûte, derbouka et bendir) s'accommodent de nouveaux instruments (violon, accordéon, luth et guitare acoustique) avec notamment la guitare électrique et sa pédale wah-wah comme chez Mohammed Zargui ou de la trompette et du saxophone comme Bellemou Messaoud.

C'est Messaoud Bellemou qui le premier remplace la traditionnelle gasba (flûte en roseau) par la trompette, ouvrant la voie du "pop Raï". Cette évolution se poursuivra jusqu'à l'arrivée des Cheb (jeunes) qui vont donner une nouvelle dimension au Raï en utilisant les instruments électroniques et créer ce que l'on appelle le Raï moderne.

A la fin des années 70 et au début des années 80, une nouvelle génération débarque avec les instruments de leur époque (synthétiseurs, batterie, guitare électrique) et viennent révolutionner le Raï en s'imprégnant des styles rock, pop, funk, reggae et disco avec notamment Mohammed Maghni, mais aussi Rachid et Fethi Baba Ahmed qui développent la production Raï. Les producteurs de disques pour les différencier des cheikh et cheikha, leur accole le surnom de cheb ou cheba (jeune en arabe).

Cheb Khaled et Renaud La première vague voit défiler Cheb Khaled, Cheb Sahraoui et Cheba Fadéla, Cheb Hamid, puis un peu après leurs cadets Cheb Mami et Cheb Hasni.

Les conditions de production sont terribles, les moyens sont très limités et le rythme de production infernal, la plupart des cheb enregistrent à une cadence folle cassette sur cassette, qui assurent une diffusion large de ce nouveau Raï.

Il faut attendre 1985 pour que l'état Algérien reconnaisse officiellement le Raï à l'occasion du premier festival de Raï à Oran. Auparavant cette musique n'avait jamais eu droit de cité à la radio ou à la télévision d'état.

La fin des années 80 marquent le début de l'internationalisation du Raï, Cheb Mami le premier s'installe à Paris, puis enregistre son album "Let Me Raï" à Los Angeles en 1989. C'est Khaled avec "Didi" qui fait le premier "tube" Raï en France, c'est avec cette chanson que le public français découvre la Raï. Khaled récidivera quelques années plus tard avec "Aïcha" écrite par Jean-Jacques Goldman.

Le succès du Raï en France, ouvre la voie à une nouvelle génération d'artistes issus de l'immigration. Pour la première fois, le Raï est coupé de son espace originel (Oran et sa région), et on voit apparaître des chanteurs et des groupes qui n'hésitent pas à métisser le Raï avec d'autres influences (funk, reggae, ...).

Le Raï aujourd'hui continue à expérimenter des nouvelles associations avec d'autres styles, d'autres musiques, particulièrement en direction du Hip Hop et des mouvements Rap, retrouvant ainsi son esprit originel de contestation sociale.